
ASPERGILLUS : champignons filamenteux, de type moisissure, dont la colonie se présente sous forme duveteuse. Le thalle, hyalin, présente un mycélium cloisonné portant de nombreux conidiophores dressés, terminés en vésicule.
Division : Ascomycota
Classe : Eurotiomycetes
Sous-classe : Eurotiomycetidae
Ordre : Eurotiales
Famille : Trichocomaceae
Classe : Eurotiomycetes
Sous-classe : Eurotiomycetidae
Ordre : Eurotiales
Famille : Trichocomaceae
Des moisissures, des maisons, des poumons.
Pour débuter cette investigation honnêtement, il convient de déconstruire les temporalités de coexistence entre les hommes et le règne fongique pour les observer sous un autre regard que celui de la société humaine : ce n’est pas le champignon qui se développe dans la maison mais la maison qui fut construite dans l’espace occupé, à l’origine, par les spores fongiques. Les moisissures n’ont aucunement eu besoin de la main de l’homme pour coloniser des espaces. Or, l’habitude de penser dominante en matière de champignons est celle-ci : c’est parce que mon habitation est mal entretenue (trop humide, trop chaude) que ces organismes, facteurs d’allergies chez l’espèce humaine, se développent.
C’est indéniable, les spores que libèrent certaines moisissures peuvent causer des infections pulmonaires et encourager l’apparition de symptômes asthmatiques chez les jeunes enfants. On peut donc dire qu’elles sont mauvaises pour la santé. Mais vivre en espace clos est peut-être, par essence, mauvais pour la santé. Á l’heure où j’écris ces lignes nous envisageons encore à peine l’effet qu’un confinement de deux mois peut avoir sur la santé physique et mentale de l’Homme. (Une chose est néanmoins certaine, limiter les déplacements massifs est une très bonne chose pour le vivant).
On ne peut se prémunir de tout, et si le covid-19 reste sur le perron de nos portes, ce n’est pas pour autant que nous ne sommes pas exposés au perpétuel gang-bang fongique. Je m’explique : Pour se reproduire les plantes et les champignons ont besoin de l’intervention de tiers pour transporter leurs spores ou leurs pollens. La plupart des fleurs (règne des métaphytes) sont entomophiles et comptent pour cela sur les insectes butineurs.

Quant aux champignons (règne des mycètes), ils sont exclusivement anémophiles, c’est à dire qu’ils comptent sur le vent ou les courants d’air pour disperser leurs spores. On va compliquer un peu la chose, chez les métaphytes, la reproduction est généralement sexuée, le pollen d’une plante devant se déposer sur les organes reproducteurs de celle du sexe opposé. Ce n’est pas toujours le cas chez les mycètes, tantôt sexués et tantôt pas. Les moisissures peuvent se reproduire à l’aide de spores (inhalables et pathogènes, donc) ou grâce à des conidies, on parle alors de multiplication et non pas de reproduction. Et, guess what ? Les conidies sont également inhalables, également pathogène.
Alors, «#Stayhome » ? Non ? Mais même dehors, les arbres non plus ne nous veulent pas que du bien. Leur mode de reproduction anémophile entraîne un risque maximal d’allergie, le fameux rhume des foins qui est, en nombre d’individus touchés, la quatrième pathologie chronique à la surface du globe selon l’OMS. « Si la plupart des pollens sont arrêtés au niveau du nez ou du pharynx, des particules plus fines, dites granules cytoplasmiques de pollen, résultant de l’éclatement des grains de pollen à la suite de chocs osmotiques, ou autres, pénètrent plus profondément dans l’appareil respiratoire et peuvent y provoquer des réactions allergiques plus importantes ». Je cite ici l’article Forêts et allergies* co-écrit par Michel Thibaudon et Jean-Pierre Besancenot. Parlons un peu de cet article, d’ailleurs : ce n’est pas tant son caractère informatif qui doit être critiqué ici, mais bien la vision anthropocentrée et aseptique de ses auteurs lorsqu’ils envisagent des mesures d’éviction. Oui, des mesures d’évictions de la reproduction des arbres, des fleurs et des champignons pour protéger les travailleurs des forêts et les populations sensibles aux pollens et aux spores. Inutile de préciser que sans pollens, pas de forêt, pas de travailleurs. Inutile, vraiment de parler ici d’aberration. Je ne suis, semble-t-il, pas la seule à aimer la science-fiction.
Dans le documentaire « tous allergiques » produit par Arte en 2014, un scientifique avait entrepris des recherches pour mettre en évidence des corrélations entre l’exposition aux moisissures et les symptômes allergiques**. Il n’est pas parvenu à ressortir des données concluantes pour prouver ce rapport de causalité. Par contre, ses recherches mettent en évidence la relation entre allergies et exposition aux substances toxiques présentes dans notre alimentation et dans notre habitation, comme les isolants, les matières anti-feu, les produits de nettoyage, les poêles non-adhésives et j’en passe. Le nombre de personnes atteintes d’allergies chroniques a explosé dans les pays industrialisés ces 50 dernières années, c’est à dire au moment où leurs populations se sont trouvées extrêmement exposées aux produits transformés dans leur alimentation et aux substances nocives dans leur habitation. Les habitations de nos ancêtres étaient bien plus sujettes aux moisissures, sans forcément de « produits adaptés » pour en venir à bout, pourtant le nombre d’individus affectés par une allergie était bien moindre.
Soit, l’exposition apériodique aux moisissures domestiques, même si elle n’est pas comparable, en termes de dangers pour la santé, à des promenades ponctuelles en forêts n’est pas pour autant une catastrophe majeure pour notre bien-être, contrairement peut-être à nos habitations et notre alimentation modernes qui sont incontestablement en train de modifier la façon dont nos défenses immunitaires répondent aux agressions extérieure.
Faut-il alors fermer les forêts pour protéger l’espèce humaine ou bien reconsidérer les relations que nous avons avec les autres espèces vivantes ? À commencer par comprendre -et non détruire- celles qui vivent avec nous, dans notre cave, notre salle de bain ou notre chambre ?
* M. Thibaudon, J-P. Besancenot. Forêts et allergies (2019) p.35-42